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Histoires de rien
6 décembre 2008

le mur

Au début , il y avait deux maisons

et un seul jardin.

Leila jouait avec Simon

dans le grand arbre qui donnait de l'ombre aux deux terrasses.

Quand Leila venait chez son voisin

La maman de  Simon lui péparait un plateau de fruits

et des gateaux sucrés .

Elle regardait l'étoile sur le mur en se disant

" La  belle étoile brille chez Simon."

Quand Simon était invité chez sa voisine,

la maman de Leila lui préparait le même plateau de fruits,

les mêmes gateaux sucrés .

Il regardait la lune déssinée sur la tenture  de la cuisine.

Il se disait :

"Qu'elle est belle cette lune, chez Leila."

Les mamans parlaient de leurs enfants :

"Comme ils se ressemblent avec leurs cheveux noirs et leurs yeux perçants!

Gloire à Dieu, voisine.

- Gloire à Dieu, voisine."

Puis les enfants  allaient jouer dans leur jardin.

*

Ca a commencé très doucement.

Au début ce n'était que quelques cailloux disposés en ligne sur le sol.

Qui les avait mis là?

Les parents de Simon ou les parents de Leila?

Il suffisait de passer par dessus.

Mais il y avait deux jardins maintenant...

Et Simon disait :" Je vais jouer dans le jardin de Leila"

Et Leila disait: " je vais jouer dans le jardin de Simon."

Les mamans accueillaient les enfants avec de gros soupirs.

Elles leur préparaient les fruits et les gateaux.

Les mêmes, toujours.

Mais elles soupiraient et leur sourire était voilé.

Le  grand arbre donnait son ombre aux deux terrasses,

planté là, au beau milieu des deux jardins.

*

Un soir d'été, après l'école , Simon a vu qu'a la place des cailloux

il y avait un muret de pierre.

Il lui arrivait juqu'au ventre .

Qui avait construit ce muret?

Les parents de Leila ou ceux de Simon ?

Leila était de l'autre côté .

Elle lui dit :" Comment va t'on faire pour jouer ?

- On va passer par dessus , Leila . "

C'est ce qu'ils firent pendant de longs mois .

De temps en temps , Leila posait un plateau de fruit et des gateaux sucrés

sur le muret .

"Tiens, c'est maman qui a préparé cela pour toi ."

Et l'arbre centenaire , enchâssé dans le muret ,

jetait son ombre familière

Sur les deux terrasses.

Il protégeait les deux maisons du même soleil ,

la maison de l'étoile, la maison de la lune.

*

- Pourquoi ne viens tu pas au même collège que moi, demande Simon adossé au mur ?

- Je ne sais pas, Simon.

Mais tu me manques beaucoup.

- Toi aussi, Leila."

Le mur avait avait grandit en même temps que les enfants.

Il dépassait leur tête d'adolescent .

Qui l'avait construit si haut ?

Les parents de Simons ou les parents de Leila?

Pour se retrouver, ils grimpaient à l'arbre , chacun de leur côté .

Dans les plus hautes branches, ils avaient leur cabane .

"Tiens, dit simon, j'ai volé ces gateaux à ma mère. Ils sont pour toi."

Leila et Simon ne jouaient plus, ils se regardaient en se tenant la main.

Ils étaient bien , dans leur arbre , comme des oiseaux amoureux .

L'arbre les accueillait et innondait de la même fraicheur

les deux maisons,  les deux terrasses,

les deux jardins.

*

Des mois passèrent encore .

Sur le haut du mur, on avait planté des tessons de bouteilles ,

posé des fils barbelé.

Qui avait fait cela ?

Les parents de Simon ou les parents de Leila ?

" - Je n'ai plus le droit de te parler, Simon.

- Moi non plus, Leila . Qu'allons nous devenir ?"

Pour la première fois , tout en haut de l'arbre, ils échangèrent un baiser ,

un baiser de jeune fille , un baiser de jeune homme ,

le baiser des filles et des garçons qui sont devenus femme et homme.

*

A la place  de l'arbre, il y avait un mur en brique

construit à la hâte, pour boucher le trou entre les deux morceaux   de mur.

Qui avait coupé l'arbre?

Les parents de Simon ou les parents de Leila?

Chacun d'un côté du mur , ils regardaient les pierres et les briques,

les morecaux de verres coupants

et les fils de fer piquants.

Sur le toit de la maison de Simon flottait un grand drapeau avec une étoile .

Sur le toit de la maison de Leila flottait un autre drapeau, avec une lune en croissant.

Le mur jetait sur les jardins son ombre grise et froide.

C'était le mur de la guerre

C'était le mur de la mort.

Dans chaque maison , on mangeait ses fruits et ses gateaux en cachette.

Les pères levaient le poing en regardant le drapeau du voisin.

Les mères avaient les yeux rouges et pleuraient chaque jour.

Tous priaient,

les uns avec l'étoile, les autres avec la lune.

Leila et Simon ne se voyaient plus, ne s'entendaient plus, ne se parlaient plus.

Mais chacun pensait à l'autre comme on pense  à un trésor.

*

Dehors, un long mur séparait la ville.

Il courait les rues comme un serpent maléfique .

Il épousait les montées, débordait les trottoires,

suivait les courbes .

Parfois, il éventrait une maison et la transperçait ,

laissant de chaque côté des ruines qui s'écroulaient lentement .

Les hommes  lançaient  des injures à ceux de l'autre côté .

Les uns criaient " c'est mon pays, on était là avant vous , partez!

Les autres répondaient, c'est mon pays, c'est moi qui l'ai construit , partez! "

Puis ils se balançaient  des grenades et des fusées .

Quand une gerbe de sang jaillissait par dessus les barbelés,

les uns pleuraient d'un côté du mur ,

les autres dansaient au son des mitraillettes ,de l'autre côté.

Mais tous avaient les mêmes yeux exhorbités, les mêmes visages défaits,

le même regard vitreux .

Le même mur à l'interieur de chacun d'eux.

*

Un soir un capitaine ,héros de la guerre , dit à Simon :

"tu as l'âge de partir au service militaire .Prépare tes affaires , il faut punir ceux de l'autre côté."

Le même soir , un héros de la guerre dit à Leila :

" rejoins nous, il faut libérer le pays de ceux de l'autre côté."

Chacun prit ses affaires et longea le mur .

Il était si long qu'il dépassait la ville .

De chaque côté tout n'était  que désolation.

Leila et simon couraient, couraient, chacun de son côté .

Mais le mur serpentait jusqu'à l'horizon , séparant les jardins , les maisons,

les villes et les campagnes.

Ils durent s'arrêter.

ils durent se cacher.

Ils étaient devenus des fuyards,

des traitres,

des  bannis,

chacun d'un côté du mur.

On les poursuivait avec une haine égale .

On disait de Leila," elle a trahi la Cause ."

On disait de Simon " c'est un lâche."

*

Un jour, le mur tomba dans la mer .

Il s'arrêtait là car il ne pouvait aller plus loin.

Leila attendait Simon sur la plage.

Quand leurs bras se serrèrent l'un l'autre,

Quand leur bouche s'unirent dans le baiser d'amour,

on dit qu'une grande fissure déchira le mur qui séparait leur jardin.

Qui la reboucha à la hâte?

Les parents de Leila ou les parents de Simon?

*

L'histoire ne dit pas s'il se marièrent et eurent beaucoup d'enfant.

Mais elle dit qu'ils firent ce qu'ils avaient à faire,

dans un pays où il n'y a pas de mur.

*

Loin de chez eux, Leila et Simon pensent au jardin de leur enfance.

Ils disent à tous que les murs finissent toujours par s'écrouler.

Ils disent à tous que les premières fissures

n'ont pas la forme d'une étoile ou d'un croissant de lune.

Ils disent qu'elles ont toujours une forme ronde et douce ,

comme le ventre d'une mère ,

comme un coeur gravé

avec une étoile et une lune dedans. 

Lio.D, Histoire de rien, le mur , juin 2008.

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Commentaires
L
HA, ha !!! me voilà disputé !<br /> J'ai essayé Nicole , on ne veut tout simplement pas de mes textes! Ce n'est pas plus compliqué que cela !!!
N
Alors ça c'est une sacré excuse bidon !
L
Il n'y a pas que des Simon et des Leila, hélas. Mais il faut croire en eux et les aider à gagner .<br /> <br /> Conteur et...45 au compteur ...trop tard , Nicole. Mais je continuerai à écrire parce que j'aime raconter des histoires. En soi, c'est une raison suffisante, non?<br /> merci de ton coùmmentaire
N
S'il ne pouvait y avoir que des "Simon" et des "Leila" !!!!!<br /> Très belle histoire porteuse d'espoir. Dis moi tu deviens un vrai conteur. Il faudrait peut-être en faire quelque chose de ce talent.
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